Idée n°21 : manger nos mauvaises herbes
Un vieil article du Sens de l’Humus, qui a toute sa place sur ce blog, puisqu’il parle d’une des composantes essentielles, mais sous-évaluée, du fameux régime méditerranéen (celui qui fait des vieillards inoxydables, et qui était le nôtre il n’y a pas si longtemps) : la consommation de plantes sauvages.
Mangez vos mauvaises herbes, article initialement publié sur le blog du Sens de l’Humus le 10 décembre 2006 :
Paul, qui est un éminent savant en matière d’alimentation naturelle, pense que l’un des secrets de la longévité et de la santé de certains peuples tient à leur consommation de plantes sauvages. Il a certainement lu François Couplan, qui soutient que la réputation de santé des Crétois tient à la place très importante que tiennent les plantes sauvages dans leur alimentation. Les plantes sauvages et spontanées, très concentrées en nutriments, y ont en effet une place très importante, et sont à la base de nombreuses recettes traditionnelles.
Nous avons par ailleurs déjà cité, dans un précédent article de nutrition, une étude sur l’alimentation du paléolithique. On y retrouvait déjà une part importante de plantes sauvages, fleurs, plantes condimentaires et épices. Et là encore, les populations de chasseurs-cueilleurs, que ce soit aux temps anciens de la préhistoire ou pour celles qui ont survécu jusqu’à maintenant, bénéficient d’une santé et d’une résistance remarquables.
Les Inuit quant à eux ont une alimentation animale à 80%. Le fait de consommer beaucoup de poissons et de viande sauvage, riches en oméga 3, les protège des maladies cardiovasculaires. Pourtant, une telle prédominance de la viande dans leur alimentation et les très faibles quantités de produits végétaux qu’ils consomment auraient dû les condamner à toute une cohorte de maladies, au vieillissement prématuré, que sais-je encore. Or, ce n’était absolument pas le cas dans les sociétés traditionnelles inuit, avant que ne s’imposent les pratiques occidentales. On peut relier cette résistance au fait que les quelques plantes consommées étaient des plantes sauvages particulièrement concentrées en nutriments, et correspondant à plusieurs fois leur équivalent en plantes cultivées.
Ainsi, nous dit Couplan par ailleurs, des plantes comme l’amarante livide, le chénopode des murs, la mauve sylvestre ou l’ortie contiennent 5 à 10 fois plus de calcium aux 100g que les meilleurs légumes cultivés. On retrouve des rapports similaires entre les plantes sauvages et les plantes cultivées pour un grand nombre de vitamines et minéraux, notamment la provitamine A ou la vitamine C. L’ortie contient ainsi 6 fois plus de vitamine C que le citron.
Notons que quand ce ne sont pas les plantes sauvages qui trustent les premières places, ce sont les fruits secs (noix, amandes), les légumineuses, les graines (onagre, courge, tournesol). Ou encore les aromates cultivés, qui tirent assez bien leur épingle du jeu.
Plus encore, les plantes sauvages contiennent de nombreux composants actifs : composés souffrés, saponines en petites quantités, caroténoïdes, flavonoïdes… toutes substances fortement protectrices pour l’organisme.
C’est sans doute dans cette concentration extraordinaire en micronutriments qu’il faut chercher les vertus des plantes sauvages. En effet, pour atteindre l’apport correspondant à une consommation raisonnable de plantes sauvages (disons 5 portions par jour, comme il nous est conseillé pour les fruits et légumes), c’est plus probablement une vingtaine de portions de fruits et légumes cultivés courants qu’il faudrait avaler. Soit une quantité énorme, à la fois inaccessible sur le plan pratique, mais aussi extrêmement dangereuse pour le système digestif.
Si nous avons vu que la pauvreté en fibre de notre alimentation nous expose à un certain nombre de problèmes de santé, à l’inverse, une trop grande quantité de fibres menace nos intestins d’irritations, de microsaignements, menant à terme à des problèmes graves, jusqu’à des cancers, et gênant l’absorption des nutriments. C’est probablement ce qui amène certains médecins, tels le Docteur Pourtalet, à considérer que les régimes trop riches en fibres sont, paradoxalement, dangereux.
La pauvreté nutritionnelle des fruits et légumes disponibles actuellement nous condamnerait donc à une perpétuelle pauvreté alimentaire : ce que nos intestins sont capables de gérer ne suffit pas, et si nous augmentons les quantités consommées pour arriver à un apport théorique suffisant en micronutriments, alors ce sont nos intestins qui trinquent. Ne reste que la solution insatisfaisante des compléments alimentaires… ou les plantes sauvages.
C’est ainsi que l’on rejoint notre philosophie du jardinage : composer avec les forces de la nature et en retirer le meilleur, plutôt que de lutter contre elles. Tout bon jardinier devrait laisser la place dans son jardin à une importante quantité de plantes spontanées. D’autant plus que, nous l’avons vu, celles-ci ont aussi une valeur très importante pour la conservation et l’amélioration des sols, et permettent en outre d’obtenir des indications précieuses sur l’état de ces sols.
Laisser pousser des « mauvaises » herbes judicieusement choisies dans un jardin n’est pas l’œuvre d’un jardinier négligent, mais bien celle d’un paysan qui cherche à nourrir les hommes et le sol du même geste en économisant sa peine. Mais bon, tout jardinier est libre de continuer à faire consciencieusement la chasse à tout ce qu’il n’a pas planté lui-même… En tout cas, c’est pas la peine de venir nous demander pouquoi nos plate-bandes ne sont pas soigneusement nettoyées comme dans le jardin de votre voisin. Vous savez maintenant pourquoi.
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Il faut se battre pour les retrouver, mais il y a ces plaquettes de l’Office de l’Environnement de la Corse qui ne sont pas mal du tout sur la question :



Nous avons aussi servi au printemps dernier des salades agrémentées de plantes et fleurs sauvages au restaurant du parc de Saleccia. Ca a été très apprécié des visiteurs, et c’est sans doute une idée à creuser pour proposer une carte de restauration originale.
fabien
16 novembre 2009 at 11:42
Oui alors lors de la prochaine famine, il n’y a que les pomme de terre qu’on saura faire pousser pour avoir des calories.
Le problème, tu me diraq, c’est que c’est trop pauvre nutritionnellement. Mais moi je te dit, ça améliore bien le sol, et c’est au milieux des culture de pomme de terre, et après, que j’ai les meilleurs plante sauvage, notament le mourron des oiseaux (et puis des amaranthes ausis, en été), pourvu que le sol soit bien enrichi en compost. Donc, ça compense bien, on mangera des pomme de terre avec du mouron autour dans l’assiette, des pommes de terre cueillies dans le jardin où pousse le mouron autour.
Jef
16 novembre 2009 at 16:02
[…] Les fruits et légumes tiennent une place importante. Ils sont consommés frais, et la présence de plantes sauvages est très importante (lire à ce sujet Le Véritable régime crétois de François Couplan). Il est […]
Idée n°32 : manger méditerranéen « 1000 idées pour la Corse
11 janvier 2010 at 10:00