Idée n°42 : remonter le courant
Parmi les techniques qui pourraient nous permettre de nous en sortir en Corse sur le plan énergétique, figure une solution au nom barbare : les STEP. Non, ça n’a rien à voir avec produire votre énergie en faisant votre gym le matin. STEP, ça veut dire Station de Turbinage Et de Pompage. Vous allez comprendre.
Quand on veut produire de l’électricité à partir de l’acqua linda di e nostre muntagne, on la stocke préalablement dans des barrages, pour avoir de la réserve. Quand la demande est là, on vide le contenu du barrage dans une turbine qui produit de l’électricité. C’est simple et efficace. Problème, quand l’eau est en bas, elle a totalement épuisé son énergie potentielle, et quand le barrage est vide, on ne peut plus produire d’électricité. C’est ce qu’il s’est passé en mars 2005, où, après un hiver de production, quand la vague de froid est arrivée, il ne restait déjà presque plus rien dans les barrages.
D’où l’idée de remonter l’eau qu’on a déjà utilisée, en profitant soit des périodes où la demande est plus faible (la nuit, par exemple), soit des périodes où la production est plus forte (quand il y a du vent et que les éoliennes tournent bien, par exemple). En général, on utilise les STEP en lien avec l’énergie nucléaire, qui produit de l’électricité de manière constante. C’est une technique qui marche bien et est assez ancienne. Son rendement, de l’ordre de 80%, est plutôt bon.
Pour une illustration, voir ici et ici.
En Corse, notre énergie n’est nucléaire que dans une faible mesure, mais une autre utilisation potentielle des STEP est liée aux énergies renouvelables : le solaire et l’éolien sont par nature instables, leur production n’est ni régulière ni régulable. Des STEP peuvent être couplées à des sources d’énergies renouvelables pour limiter cet inconvénient. Quand les éoliennes ou les panneaux solaires tournent à plein, on fait remonter de l’eau dans le barrage. Quand le vent se calme ou qu’il n’y a pas de soleil, on turbine cette eau (donc on la fait redescendre) pour produire de l’électricité. On arrive ainsi à une production plus régulière.
Les STEP nécessitent de construire, en plus du barrage principal, une retenue en aval pour stocker l’eau, en attendant de la remonter. Dans le cas classique (celui où on utilise chaque jour les heures creuses pour faire remonter l’eau), la retenue en aval n’a pas besoin d’être très grande. Par exemple, à Calacuccia, il suffirait d’une retenue de l’ordre de 5% du volume du barrage. Mais cela implique qu’on utilise aux heures creuses l’énergie dont on dispose à ce moment-là. En Corse, ce seraient pour l’instant plutôt celle issue des centrales thermiques, et irrégulièrement celle de l’éolien.
En revanche, si on veut coupler une STEP à grande échelle à une production éolienne, il faut pouvoir stocker de l’eau pendant des périodes de calme plat de plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Il faut donc que la retenue en aval soit nettement plus importante que dans le cas précédent (imaginez que le barrage se vide pendant plusieurs jours, et qu’il faille stocker toute cette eau en attendant que le vent se lève et qu’on puisse la remonter). Pour Calacuccia, si on veut se donner deux semaines d’autonomie, il faudrait construire en aval, à Castirla, un barrage d’environ 7 millions de m3 (équivalent au barrage du Reginu).
Pour le solaire, il y aurait deux possibilités : soit utiliser les STEP pour remonter de l’eau le jour quand le soleil brille et la turbiner la nuit. Là, il n’y aurait besoin que de petites retenues en aval, mais ça serait surtout efficace l’été, quand la production solaire serait excédentaire. Soit stocker l’excédent de production de l’été en prévision de l’hiver, mais là, il faudrait des barrages gigantesques.
Des solutions pour produire plus d’énergie en Corse, plus propre, il n’en manque pas, mais elles sont forcément coûteuses et aucune ne représente une panacée. On en revient toujours au même problème : la meilleur énergie, c’est celle dont on maîtrise et régule la consommation.
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Remarque : les données ci-dessus sont issues de mes calculs personnel, à partir des éléments dont je dispose. Si jamais je m’étais trompé quelque part, merci de me le signaler.
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Pour Calacuccia.
Barrage : environ 23 millions de m3
Puissance : environ 40MW (moins de 10% de la puissance appelée en pointe en hiver en Corse)
Il se viderait en 3 semaines à pleine puissance sans apport, mais le Golu en amont assure 50% de remplissage.
A pleine puissance : 1 million de m3 par jour en sortent, il en rentre simultanément la moitié.
Donc, si on veut stocker pour 2 jours, il faut une réserve d’1 million de m3 en aval.
Puissance requise pour faire remonter 1 million de m3 en un jour : environ 50MW.
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Le hic, c’est l’impossibilité de créer des retenues d’eau à cause des « écolos » et de nombreux corses du continent qui veulent – quand ils viennent en vacances – garder leur village comme avant…
Je ne donne raison ni aux pour, ni aux contre : c’est juste à prendre en considération.
N’existe-t-il pas une solution permettant l’installation de plusieurs turbines le long de la descente de l’eau dans la conduite forcée ?
Chnoupi
20 février 2010 at 19:04
« N’existe-t-il pas une solution permettant l’installation de plusieurs turbines le long de la descente de l’eau dans la conduite forcée ? »
il n’y pas intéret pour produire plus d’énergie, chaque turbine aura moins de puissance.
La puissance est déterminé uniquement par le débit et la hauteur d’eau totale, hauteur continue sous pression. Après chaque turbine il n’y a plus de pression.
Jef
4 mars 2010 at 14:59
Ce serait dommage de ne pas profiter de l’énergie solaire dans cette zone. L’investissement est assez grand mais à long terme ca vaut la peine.
Corse
31 octobre 2012 at 11:11